Vers 5 heures du matin, nous quittons le confort du port pour une traversée durant de 22 à 35 heures selon si le vent nous accompagne ou non. Cela fait presque un mois que chaque navigation est marquée par de grosses vagues, des rafales et des matelots malades. Nous étions donc un peu anxieux face aux heures à venir.

Nous avons passé une première partie magique, avec le vent dans le dos et un beau soleil. Le pilote automatique en route, nous avons profité de cette liberté qui s'offrait à nous. Nous avions l'impression d'être un grain de sable au milieu de l'océan et l'horizon formait un disque sans aucune autre vision que la mer...Un sensation extraordinaire!

L'adrénaline et la tension accumulée s'est transformée en euphorie et petit à petit le volume de la musique a été poussée à son maximum. Peu nous importait, nous étions seul au monde et heureux de réaliser nos rêves et d'être ensemble.

J'étais en train de faire une petite sieste au soleil, lorsque le hurlement de Cloé m'a réveillée en sursaut. Mon premier réflexe fut de m'assurer que nous étions toujours quatre à bord. Une fois le décompte fait, j'ai compris que l'agitation des filles venait d'un invité...un petit oiseau posé sur la tête de Léa. À se demander comment la pauvre bête à fait pour se retrouver à plus 40 de miles des côtes. Cela dit, notre invité semblait épuisé, il est resté avec nous un moment, nous lui avons donné des miettes de pain, mais comme nous ne voulions pas risquer de marcher dessus, nous avons essayé de le mettre dans un bac à jouet et il s'est envolé.

Le jour a fait place à la nuit, le calme à la tempête et le vent et les vagues se sont levés. Nous avons du coucher Cloé dans le salon pour éviter qu'elle soit trop malade et Léa, égale à elle-même, s'est couchée dans sa cabine.

Les nuages noirs ont commencé à encercler la lune et une barrière d'orage s'est formée à l'horizon. Stef m'a réveillée vers 3 heures du matin car les orages et les éclairs commençaient à être dangereusement proches et venaient dans notre direction. Après une mise au point, nous avons décidé de préparer une éventuelle évacuation d'urgence avec le radeau de survie et avons donc préparée les filles. Comme elles étaient endormies, elles n'ont pas posé beaucoup de questions. Je leur ai juste dit qu'il pleuvait beaucoup dehors et que l'on ne voulait pas qu'elles soient mouillées à l'arrivée au port. Les risques que le mat soit touché par un éclair et que cela perfore le bateau sont très faibles, puisqu'il aurait fallu que l'éclair tombe dans un rayon de 50 mètres, mais la fatigue et la tension du moment ont probablement un peu dramatisé la situation. Nous avons donc décidé de passer entre deux nuages d'éclairs afin de nous positionner après l'orage et non plus être poursuivit par celui-ci.

Le soleil s'est enfin levé et nos les orages ont progressivement disparu. Nous avons approché des côtes siciliennes en début d'après-midi. Stef dormait et j'étais à la barre, quand tout d'un coup, la mer est devenue marron, je pensais à des rafales et j'ai appelé Stef pour qu'il vienne m'aider un rentrer un peu de voile, mais au lieu du vent s'est une énorme pluie qui s'est abattu sur nous. Bien que cela n'ait durée que quelques minutes, cela a été suffisant pour que je sois trempée de la tête au pied.

Nous sommes finalement arrivés au port de Marsala en Sicile vers 16 heures, soit après 35 heures de navigation. Nous salivions déjà à l'idée d'une bonne bière...ou deux, lorsque le responsable de la marina nous annonce au téléphone que l'infrastructure d'accueil des plaisanciers est en construction et qu'il n'y avait donc pas de place pour les bateaux de passage. Pas question de se retrouver dans un mouillage non protégé, secoué par les vagues, alors que l’on n’avait presque pas dormi de la nuit. Je me suis un peu obstiné à la VHF avec le port et ils nous ont trouvé une place.