Contrairement à César, nous ne vaincrons pas en 1 jour, mais il nous faudra presque 10 jours pour arriver à bout d’une mer déchainée et rejoindre à Nassau. Sachant que ce n’était même pas notre destination!

Nous sommes partis en début de soirée des Îles Vierges Britanniques. Contrairement à d’habitude où nous nous reposons et préparons tranquillement le bateau avant une longue navigation, nous sommes partis un peu précipitamment.

Nous avons eu une mer agitée avec des vagues arrière venant des deux côtés. Pénible, mais on finit par s’y habituer. Au bout de quatre jours, nous pensions nous arrêter à Mayaguana, la première île du sud des Bahamas (plan A). Sauf qu’il nous restait encore plusieurs heures d’ensoleillement et que Stef ne savait plus si nous pouvions faire l’immigration d’entrée sur cette île. Nous avons donc décidé de poursuivre et de passer une nuit à la sauvette à Plana cays. Ce n’est pas sur cette mini île, non habitée, que les garde-côtes allaient nous contrôler. Notre premier plongeon est hallucinant, l’eau est translucide!

Le vent du nord s’est levé avant le soleil et nous avons dû partir très tôt. La baie n’étant pas protégée du nord, une houle d’un peu plus d’un mètre nous mettait dans le bain pour les prochains jours.

Nous pensions nous rendre à George Town au sud des Exumas pour faire notre entrée et ensuite visiter tranquillement le pays (plan B). Cela nous aurait pris 24 heures en temps normal! Au bout de quelques heures, nous avons dû battre en retraite face à un vent du nord de 35 nœuds et des vagues de 5-7 mètres. À chaque vague prise de face, le bateau tapait à tout rompre. Nous étions trempés, fatigués des 4 jours de navigation que nous venions de faire et le vent devenait de plus en plus fort. Le vent du nord, apporte le froid du Canada et nous avons vraiment senti le changement de température! Nous avons donc changé de cap pour avoir le vent plus de dos ce qui est plus facile.

Nous avons donc repris un cap plus vers le sud…alors que nous devions aller au nord. Mais c’est la mer qui décide! Nous prévoyions donc aller au sud-ouest de Long Island qui devait être protégée du nord et y passer la nuit (plan C). Mais nous sommes arrivés la nuit et nos cartes Navionix pour les Bahamas ne sont pas assez détaillées. Il y a peu de profondeur, beaucoup de patates de corail et il faut souvent naviguer à vue. Nous sommes épuisés, mais pas assez pour risquer d’échouer le bateau!  

Re-changement de destination. Nous continuons vers l’ouest, pour rejoindre les Ragged Island que nous apercevons de loin en matinée (Plan D). Nous voyons sur l’AIS que deux bateaux sont dans la baie où nous voulons aller. Cela nous redonne de l’énergie. Enfin un endroit protégé où l’on va pouvoir se reposer et se mettre au chaud et au sec. J’arrive à joindre un des bateaux par VHF, et parle à un français. Ils quittent le mouillage, c’est intenable. Ils partent vers Cuba, leur prochaine destination. C’est dépité et au bord de larmes que j’annonce à Stef que nous devons trouver un plan E. Si nos amis du Québec nous nous retrouvaient pas deux semaines plus tard pour passer quelques jours avec nous, j’aurais laissé tomber les Bahamas pour Cuba.

C’est très compliqué de naviguer au Bahamas sans les cartes Explorers, nous nous en rendons compte. Il y a des haut-fonds partout, les passes sont petites et la profondeur généralement de quelques mètres seulement. Il ne nous reste plus qu’à monter sur Nassau soit par l’ouest d’Andros (l’île nous protègera au moins de la houle) ou par le Tongue of the Ocean, textuellement la langue de l’océan. Chaque option a son inconvénient. Par Andros, il fallait compter 3 jours de plus de navigation avec un risque de ne plus avoir de vent…C’est notre expérience des Bahamas, soit sa souffle à 35 nœuds, soit c’est le calme plat! Soit passer par la Tongue of the océan et trouver le chenal la nuit avec nos cartes! Cette fois, on en a vraiment marre et choisissons l’option la plus rapide par la Tongue.

Les Bahamas sont ceinturés d’une eau turquoise peu profonde. La Tongue of the ocean est un bras de mer qui pénètre le banc entre les Exumas et Andros et qui contrairement au reste est de plus de 1000 mètres de profondeur.

Nous empruntons donc un chenal naturel pour passer entre les deux zones. Mis à part les risques d’accrocher les fonds, nous avions surtout peur d’être pris par une forte houle qui se casse lorsque confronté à la différence de profondeur avec le banc. Un peu comme lorsque les vagues se cassent sur les rochers. Et comme il faisait nuit noire, nous ne l’aurions pas su avant d’être dessus. Heureusement, les filles étaient couchées. Nous avons passé plus d’une heure à écouter la mer, les yeux fixés sur le profondimètres. Bien que le stresse monte à chaque mile, je ne peux empêcher mes yeux de fermer de fatigue.

Nous passons sans problème la passe et nous décidons en matinée de nous arrêter à Green Car, un îlot au milieu de nulle part. L’eau est translucide, mais pas très chaude. Je passe l’après-midi à faire du bricolage avec les filles. Elles ont vécu cette navigation de façon admirable, sans jamais se plaindre!

Le lendemain, nous reprenons les voiles en direction de Nassau. Cette fois, le vent s’est calmé et nous attrapons une superbe dorade. Nous arrivons proche de Nassau en fin d’après-midi et jetons l’ancre dans un mouillage. Un peu de repos avant d’affronter la ville n’est pas superflu.